samedi 28 avril 2012

Bamaser = les Religieuses


Impossible de parler de l’Eglise au Congo, sans parler de bamaser. Le mot est déjà comique, puisque composé de « ba » qui veut dire les (pluriel) et « maser » pour « ma sœur » transposé ! Les religieuses.

Garden-party au Thabor à l'occasion de l'anniversaire de la supérieure
Soeur Mariana, latino-américaine.


Dès notre arrivée à Kananga, nous avons été assiégés par les communautés féminines, dont certaines font mine d’être vexées parce qu’on ne leur a pas encore rendu visite. Nous avons pourtant visité et accepté des bières dans un tel nombre de communautés que je finis par tout mélanger entre les Sœurs de la charité de ceci et les Sœurs de l’Immaculée de cela…
Il y a une dizaine de congrégations sur la ville qui ont chacune 5 à 6 communautés de 3 à 6 sœurs, avec en plus des communautés d’aspirantes, des maisons d’étudiantes et des noviciats. Et donc leurs différentes maisons opèrent allégrement un mitage du territoire urbain qui ferait fulminer Franz Weber.
Elles sont ainsi présentes un peu partout dans les 30 paroisses. Un père clarétain m’avait dit un jour à Kin qu’ « une paroisse sans sœurs c’est comme une matinée sans café ! » C’est une remarque qui a du fumet et de la pertinence. Mais leur action ne se limite pas aux paroisses : elles tiennent les meilleures écoles de la ville, travaillent dans les meilleurs hôpitaux (diocésains !), tiennent des maisons d’accueil (comme ce Thabor qui nous a reçu, tenu par les carmélites de Saint-Joseph)… Elles sont bien formées, Sr Marguerite est docteur en linguistique, Sr Chantal est médecin, Sr Clémentine docteur en ingénieurie agro-alimentaire, Sr Marianne enseigne l’exégèse biblique au séminaire interdiocésain des prêtres, et beaucoup ont fait de la théologie à l’université catholique…
De plus elles sont drôles, pétillantes avec une tonalité africaine pour dire « vraiment ! » qui est proprement inimitable. Pleines d’humour et de vivacité. Autant que nos sœurs européennes, mais sans ce besoin d’avoir toujours à s’excuser d’être religieuses qui pèsent parfois sur les épaules des consacrées de chez nous.

Elles ont résolu ici le problème de l’habit de façon très classe. Certaines congrégations portent encore la robe religieuse, mais la plupart, sous l’impulsion de l’africanisation du cardinal Malula, ont adopté le costume local qui pourtant les fait reconnaître du premier coup d’œil. Elles portent le pagne coloré des femmes congolaises mais avec la chemise fermée haut sous le cou et avec un foulard tiré de façon stricte. On ajoute la croix de la congrégation et elles sont très élégantes tout en étant très religieuses, sans ambiguités. Un jour dans un couvent d’une congrégation internationale d’origine belge, il y avait une photo du conseil général entourant la mère générale indienne : 6 sœurs : deux africaines en pagne, deux indiennes en sari et deux européennes en bleu. Devinez lesquelles étaient les moins bien habillées?

Le problème des vocations. Les sœurs africaines sont plutôt jeunes. Mais, avec retard sur la situation européenne, elles commencent à sentir le fléchissement des vocations. Alors qu’il y a 10 ans, les grands noviciats pouvaient avoir jusqu’à 60 candidates, il n’y en a plus que 25 maintenant ! La sécularisation et l’émancipation fait aussi son chemin chez la femme africaine, et cela a des répercutions dans des noviciats souvent très longs et stricts. Jusque là la vie religieuse pouvait être perçue comme une échappatoire à la dure condition familiale de la femme. Mais l’éducation y a mis son grain de sel. Sans doute n’est-ce pas plus mal. De plus il me semble que les défections sont assez nombreuses aussi dans les communautés, même après les vœux. Rien n’est facile. Mais « bamaser, malgré tout, bravo ! »

Mercredi 25. Nous avons pris notre matinée pour aller à Malole, un quartier éloigné de la ville où se trouve le séminaire inter-diocésain de théologie des futurs prêtres. Nous l’avons visité et avons fait une prière au cimetière des prêtres du diocèse qui se trouve dans le jardin du séminaire.

 C’est aussi là qu’a été enterrée la Sr Liliane, tuée au couteau dans des circonstances politiques troubles au mois de février et qui a sur le diocèse une aura proche d’une martyre d’aujourd’hui…

Près du séminaire, s’est établi le Carmel. Ce sont les seules contemplatives cloîtrées du diocèse, depuis que les bénédictines de notre colline ont choisi une vie semi-cloîtrée sous la houlette pastorale de l’évêque. Les carmélites nous ont reçus avec ces mêmes entrain et calme inimitables qu’on retrouve dans les différents carmels de Suisse et du monde malgré leurs différences. Ces femmes prient pour les prêtres et les séminaristes et elles nous ont dit leur joie de voir notre communauté s’établir sur la colline. Un point fort et lumineux dans le réseau « bamaser ».


1 commentaire:

  1. La baisse des vocations religieuses est donc universelle !
    Prions l'Esprit-Saint d'éclairer les appelés afin qu'ils suivent "leur" chemin sans crainte et dans la joie.

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