Impossible
de parler de l’Eglise au Congo, sans parler de bamaser. Le mot est déjà
comique, puisque composé de « ba » qui veut dire les (pluriel) et « maser »
pour « ma sœur » transposé ! Les religieuses.
Garden-party au Thabor à l'occasion de l'anniversaire de la supérieure
Soeur Mariana, latino-américaine.
Dès notre
arrivée à Kananga, nous avons été assiégés par les communautés féminines, dont
certaines font mine d’être vexées parce qu’on ne leur a pas encore rendu
visite. Nous avons pourtant visité et accepté des bières dans un tel nombre de
communautés que je finis par tout mélanger entre les Sœurs de la charité de
ceci et les Sœurs de l’Immaculée de cela…
Il y a une
dizaine de congrégations sur la ville qui ont chacune 5 à 6 communautés de 3 à
6 sœurs, avec en plus des communautés d’aspirantes, des maisons d’étudiantes et
des noviciats. Et donc leurs différentes maisons opèrent allégrement un mitage
du territoire urbain qui ferait fulminer Franz Weber.
Elles sont
ainsi présentes un peu partout dans les 30 paroisses. Un père clarétain m’avait
dit un jour à Kin qu’ « une paroisse sans sœurs c’est comme une
matinée sans café ! » C’est une remarque qui a du fumet et de la
pertinence. Mais leur action ne se limite pas aux paroisses : elles
tiennent les meilleures écoles de la ville, travaillent dans les meilleurs
hôpitaux (diocésains !), tiennent des maisons d’accueil (comme ce Thabor
qui nous a reçu, tenu par les carmélites de Saint-Joseph)… Elles sont bien
formées, Sr Marguerite est docteur en linguistique, Sr Chantal est médecin, Sr
Clémentine docteur en ingénieurie agro-alimentaire, Sr Marianne enseigne l’exégèse
biblique au séminaire interdiocésain des prêtres, et beaucoup ont fait de la
théologie à l’université catholique…
De plus
elles sont drôles, pétillantes avec une tonalité africaine pour dire
« vraiment ! » qui est proprement inimitable. Pleines d’humour
et de vivacité. Autant que nos sœurs européennes, mais sans ce besoin d’avoir
toujours à s’excuser d’être religieuses qui pèsent parfois sur les épaules des
consacrées de chez nous.
Elles ont
résolu ici le problème de l’habit de façon très classe. Certaines congrégations portent encore la robe religieuse, mais la plupart, sous l’impulsion de
l’africanisation du cardinal Malula, ont adopté le costume local qui pourtant
les fait reconnaître du premier coup d’œil. Elles portent le pagne coloré des
femmes congolaises mais avec la chemise fermée haut sous le cou et avec un
foulard tiré de façon stricte. On ajoute la croix de la congrégation et elles
sont très élégantes tout en étant très religieuses, sans ambiguités. Un jour
dans un couvent d’une congrégation internationale d’origine belge, il y avait
une photo du conseil général entourant la mère générale indienne : 6
sœurs : deux africaines en pagne, deux indiennes en sari et deux européennes
en bleu. Devinez lesquelles étaient les moins bien habillées?
Le problème
des vocations. Les sœurs africaines sont plutôt jeunes. Mais, avec retard sur
la situation européenne, elles commencent à sentir le fléchissement des
vocations. Alors qu’il y a 10 ans, les grands noviciats pouvaient avoir jusqu’à
60 candidates, il n’y en a plus que 25 maintenant ! La sécularisation et
l’émancipation fait aussi son chemin chez la femme africaine, et cela a des
répercutions dans des noviciats souvent très longs et stricts. Jusque là la vie
religieuse pouvait être perçue comme une échappatoire à la dure condition
familiale de la femme. Mais l’éducation y a mis son grain de sel. Sans doute
n’est-ce pas plus mal. De plus il me semble que les défections sont assez
nombreuses aussi dans les communautés, même après les vœux. Rien n’est facile. Mais
« bamaser, malgré tout, bravo ! »
Mercredi
25. Nous avons pris notre matinée pour aller à Malole, un quartier éloigné de
la ville où se trouve le séminaire inter-diocésain de théologie des futurs
prêtres. Nous l’avons visité et avons fait une prière au cimetière des prêtres
du diocèse qui se trouve dans le jardin du séminaire.
Près du
séminaire, s’est établi le Carmel. Ce sont les seules contemplatives cloîtrées
du diocèse, depuis que les bénédictines de notre colline ont choisi une vie
semi-cloîtrée sous la houlette pastorale de l’évêque. Les carmélites nous ont
reçus avec ces mêmes entrain et calme inimitables qu’on retrouve dans les
différents carmels de Suisse et du monde malgré leurs différences. Ces femmes
prient pour les prêtres et les séminaristes et elles nous ont dit leur joie de
voir notre communauté s’établir sur la colline. Un point fort et lumineux dans
le réseau « bamaser ».
La baisse des vocations religieuses est donc universelle !
RépondreSupprimerPrions l'Esprit-Saint d'éclairer les appelés afin qu'ils suivent "leur" chemin sans crainte et dans la joie.