mardi 5 juin 2012

Le menuisier et le doigt de Dieu


Les différents travaux que nous entreprenons ou supervisons sont un délicieux et détonnant cocktail de poings dans la poche, de sourires convenus, de victoires à l’arraché, d’amertumes rentrées, de contentements épanouis. Parlons donc des collaborations positives et roboratives. C’est le cas de celle que nous entretenons avec Fernand, le menuisier du village.
Il nous a proposé ses services dès notre arrivée. C’est un petit jeune homme apparemment assez fluet mais qui cache une personnalité forte et solide. Je le croyais juste sorti de l’adolescence et de sa formation professionnelle apprise chez son père, jusqu’à ce qu’il m’annonce que sa femme attend leur cinquième enfant !
Ce gars est un de ces artisans comme on les aime ! Très compétent malgré un outillage assez défaillant, très inventif, passionné et très dévoué. Alors qu’on voulait l’employer « à la tâche », comme ces tâches se multipliaient et que nous ne savions plus comment comptabiliser et rémunérer, nous avons décidé de l’engager jusqu’à la fin juin presqu’à demeure. Il a installé son établi sous un manguier de l’esplanade.

Fernand (à droite) que ses amis viennent aider ou visiter sous le manguier
et qui veulent être sur la photo...

Il y a tant à faire ici et là, à la maison, et notamment à l’église dont les armoires de la sacristie tombaient en ruine. Elles n'avaient plus d’étagères (pourquoi ?) et l’ancien curé posait le calice et les livres au fond d’un placard empoussiéré et accrochait ses ornements en loques à de vagues clous. Fernand a mis des moustiquaires aux ouvertures béantes du local, fait des étagères aux armoires qu’il a vernies, confectionné de magnifiques chandeliers pour l’autel. Du très beau boulot.
Le chœur de l’église a un très grand et beau Christ africain en bois cloué sur une croix en métal, mais un des clous avait abîmé et arraché une partie de la main de Jésus. Lors des premières messes on voyait une ficelle blanche retenir le Christ par le bras dans un équilibre douteux…
Un jour, Fernand vient candidement me dire qu’il veut me « montrer la main ». J’avais oublié quelle main avait besoin de ses soins mais il me conduit devant l’église où le crucifix est par terre avec un doigt tout neuf et… blanc : la main avait été réparée à la perfection. Un coup de peinture et le Christ a retrouvé toute sa majesté pour la fête de Pentecôte. Chapeau Fernand ! Cet artisan est un artiste. 


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