Je ne
connaissais pas le mot minervales
avant mon arrivée au Congo. Cela désigne en Belgique et dans son ex-colonie les
frais scolaires pour les écoles supérieures (taxes d’inscription et
d’enseignement).
Ici la
rentrée arrive le 3 septembre, et avec elle les gros soucis des parents de
pouvoir assumer pour leurs enfants : la minervale, les frais annexes (pour
les jeunes qui étudient loin de leur famille : nourriture et logement),
les uniformes scolaires (chemises blanches, jupes et pantalons bleus). Les
difficultés financières énormes découragent quelques fois et la déscolarisation
laisse souvent des enfants et des jeunes intelligents au bord des chemins.
Cette idée m’est insupportable. Ma communauté a donc décidé de verser une goutte
de solidarité dans cet océan de besoin.
Nous avons
aidé les jeunes des écoles secondaires et supérieures (cette année les élèves
de primaires n’auront pas de taxes scolaires à payer, et donc nous avons moins
de souci pour eux !). Par contre les frais pour les plus grands
représentent beaucoup de journées de travail pour leurs parents (ici sur la
colline, une journée de travail aux champs vaut 1 Frs, c’est dire !)
Mais il ne
faut plus rien donner aux Africains sans sueur et sans travail si nous voulons
que la leçon porte à plus long terme. C’est ainsi que nous avons décidé de
subventionner le travail de ces jeunes (ils sont une trentaine à avoir
participé à l’action) que nous avons mis avec des outils sur la route qui traverse la colline.
C’est une route publique et fréquentée mais l’Etat ne l’entretient plus depuis
longtemps, ce qui fait qu’elle va être impraticable à cause des rigoles et des
fossés lorsque la saison des pluies qui s’annonce sera là.
Il faut
débroussailler les bords, creuser des échappées d’eau, remblayer avec de la
terre, de vieilles briques et éventuellement de la caillasse les fossés que les
précédentes pluies ont creusé de façon presque inimaginables.
C’est du
travail, et cela mérite salaire. Mais quant à savoir si cela sera utile longtemps
pour la route, c’est une autre question, qu’il vaut mieux pas trop
« creuser » (c’est le cas de le dire) si nous ne voulons pas
désespérer comme pour beaucoup de choses ici au Congo…
La Route et
l’Education. Si l’Etat investissait de façon massive (cet argent qu’il a, mais
qui part on ne sait où), intelligente et durable dans ces deux domaines, comme
ce pays irait mieux !
Quand on lance une action, on n’est perçoit pas
tous les problèmes collatéraux. Ceux-ci furent d’ordre œcuménique. Ici l’état
somnolent de la paroisse avant notre arrivée a fait le beurre des autres Eglises,
minuscules mais bien présentes : nous côtoyons aux alentours de notre
colline des témoins de Jéhovah, des néo-apostoliques, des adventistes, des
sectes du réveil…
Comme je pense qu’il faut balayer d’abord
devant sa porte, notre action « minervales » s’adressait aux jeunes, habitant la paroisse et
étant catholiques (les autres n’avaient qu’à s’adresser à leur pasteur !).
Et ce qui devait arriver est arrivé. Beaucoup de gens qui priaient dans les églises
parallèles se sont trouvé tout à coup des attachements très forts avec l’Eglise
catholique. Des parents néo-apostoliques engagés sont même venus me présenter
leur enfant en disant que ce n’est pas parce que eux ne sont pas catholiques
que leurs enfants ne peuvent pas l’être… Je ne m’en sortais plus…
J’ai pensé – malencontreusement – à cette
phrase de l’histoire médiévale cathare : « Tuez-les tous, Dieu
reconnaîtra les siens ! ». Très malencontreusement.
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